Comprendre la douleur d'autrui : l'empathie localisée dans le cerveau
May 12, 2020 | News | No Comments
Peut-on partager une douleur que l’on n’a jamais éprouvée ? Oui, si l’on en croit les chercheurs de l’Inserm qui ont étudié l’activité cérébrale de patients atteints d’une Insensibilité Congénitale à la Douleur (ICD).
Le terme d’empathie se réfère à la possibilité de comprendre et de partager les sensations ou les émotions éprouvées par autrui. Longtemps étudiée par la philosophie, la psychologie ou les sciences sociales, l’approche de cette notion sous l’angle des neurosciences est plus récente. Ainsi plusieurs études ont montré récemment qu’il existe un certain degré de recouvrement entre les régions cérébrales activées lors de la sensation douloureuse éprouvée à la première personne et celles activées à la vue ou lors de l’évocation de la douleur d’autrui.Dans le domaine de la douleur, l’expérience clinique suggère que les capacités d’empathie du médecin ou du personnel soignant sont susceptibles d’influencer fortement l’estimation de la douleur du patient et la réponse thérapeutique qui est donnée à sa plainte. Ces dernières années, plusieurs études utilisant les techniques d’imagerie cérébrale fonctionnelle ont cherché à mieux définir les mécanismes cérébraux de la perception de la douleur d’autrui chez des sujets sains.Dans le prolongement de ces travaux, l’équipe du Dr Nicolas Danziger de l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière ont cherché, grâce à l’imagerie fonctionnelle par résonance magnétique (IRMf), à étudier par quels mécanismes cérébraux les patients atteints d’une insensibilité congénitale à la douleur (ICD) sont susceptibles d’imaginer la douleur d’autrui alors qu’ils ne connaissent pas les sensations que cette dernière entraîne. Confrontés à des photos montrant des parties du corps dans diverses situations douloureuses, ces patients ICD disent que le spectacle de la douleur d’autrui revêt pour eux un caractère abstrait, aussi bien dans la vie de tous les jours qu’à la vue d’un film. Mais plus les patients ICD sont dotés de capacités d’empathie élevées (évaluées par questionnaire), plus la région de leur cerveau qui est liée à la relation entre la douleur d’autrui et les émotions sociales comme la compassion, se trouve activée.Pour compenser le manque de résonance avec la douleur d’autrui, les patients ICD doivent donc recourir à un travail cérébral complexe qui dépend de leur capacité d’empathie. C’est d’ailleurs grâce à ce processus que chacun peut imaginer des affects qu’il n’a jamais vécu.Sources :Communiqué de l’Inserm janvier 2009Neuron, 29 janvier 2009